CINQ PERSONNAGES EN QUETE D'AMOUR

BESANCON ALAIN

B.DE FALLOIS

Résumé :

À travers vingt-huit siècles et cinq chef-d'oeuvres l'auteur nous propose une promenade au pays des passions

de l'amour. Il a remarqué que L'Odyssée pouvait être lue comme une galerie de femmes devant lesquelles

passait Ulysse, entre son départ de Troie et le retour dans son île natale. Et que, de la même façon, dans

L'Éducation sentimentale, Flaubert faisait passer son héros devant une série de femmes, fort différentes entre

elles et bien éloignées de celles du poème homérique. Son point de départ est donc Ulysse, et son point

d'arrivée Frédéric Moreau. Entre les deux, le chemin est sinueux, de livres en livres.

En cours de route, deux évidences s'imposent. La première est que dans toutes les affaires amoureuses,

jusqu'à une date récente, s'affirme la présence active du divin. Chez les Anciens, les dieux faisaient tout selon

leur caprice. On peut appeler cela l'Ancien régime de l'amour. Le Nouveau régime de l'amour commence

quand un autre dieu, le Dieu unique, donne aux hommes une loi et en même temps la liberté dangereuse de

la suivre ou de l'enfreindre. Il s'ensuit une complication psychologique qu'ignoraient les héros grecs. La

seconde évidence est que la distinction de nature entre la passion amoureuse et l'amour conjugal a été affirmée

et commentée à suffisance par les Anciens et que cette distinction a été confirmée et enrichie dans le Nouveau

régime. Elle est seulement devenue plus dramatique. Dieux multiples ou Dieu un, fatalité ou libre arbitre,

passion amoureuse ou amour conjugal : ce dispositif simple permet de multiples combinaisons.

Homère fait passer Ulysse par les femmes pour le conduire à son foyer où l'attendait Pénélope. Il est un

modèle normatif. En héros exemplaire il suit les règles de la cité.

David a commis un adultère, en a pris conscience, s'est ouvert au repentir et au pardon. Il est un modèle

normatif du Nouveau régime. Il inaugure le genre de tourment, qui va marquer les amours modernes.

L'histoire de Tristan et Yseut hante le monde chrétien parce qu'elle illustre de la façon la plus poignante le

conflit entre la passion amoureuse et le mariage.

L'auteur s'arrête longuement sur La Nouvelle Héloïse. Rousseau récapitule l'expérience de l'Europe et la

relance sur de nouveaux chemins. Un point capital doit être remarqué : l'affaiblissement de la religion. Il faut

que Julie invente la sienne pour tenir le cap, fort incertain, de sa fidélité.

De religion, il n'y a plus trace dans L'Éducation sentimentale. Les personnages doivent se débrouiller seuls

avec leurs passions, sous un Ciel vide qu'ils n'invoquent pas et auquel ils ne pensent même plus.