PREMIERS ECRITS CHRETIENS ( BICP* )
COLLECTIF
GALLIMARD
Résumé :
Premiers : les plus anciens de ces textes sont immédiatement postérieurs aux derniers écrits des apôtres
Pour exprimer les réalités nouvelles, les vieux mots changent de sens : baptizein, «immerger », devient «baptiser» ; ekklesia, «assemblée », signifie désormais «église». Chrétiens : la période est celle de l'autodéfinition du christianisme. Le terme apparaît autour de 117, chez Ignace d'Antioche. C'est le temps de la séparation, plus ou moins rapide et marquée selon les ères culturelles, d'avec le judaïsme. Se constituent peu à peu des usages liturgiques, des règles communautaires, un canon des Écritures, des doctrines qui formeront le dogme de l'Église «catholique», c'est-à-dire universelle. Naissance d'une religion, d'une Église, d'une littérature.
À la fin du Ile siècle, sous l'oeil des «païens» et des juifs
Ce volume contient :
Témoignages juifs et païens sur Jésus et sur le premier christianisme : Témoignage sur Jean dit le Baptiste - Témoignages sur Jacques et Jésus - Sous Claude _ Sous Néron - Pline à Trajan _ Rescrit de Trajan - Le jugement des intellectuels «païens» - Caricature, satire et polémique «païennes» - Jésus et le premier christianisme dans la traditiion rabbinique. La vie des communautés : épîtres et manuels de discipline : Professions de foi et formules baptismales - Le fragment de Muratori - Épître aux Corinthiens - Seconde épître aux Corinthiens - Didachè : Doctrine du Seigneur transmise par les douze apôtres aux nations - Le Pasteur - Lettres - Lettres d'évêques - Sur la Pâque. Actes et passions de martyrs : Martyre de saint Polycarpe - Martyre des saints Carpos, Papylos et Agathonicé - Martyre des saints Justin, Chariton, Charitô, Évelpistos, Hiérax, Péon, Libérien et de leur communauté - Lettres des Églises de Lyon et de Vienne - Martyre de l'apôtre saint et loué partout Apollonios - Actes des martyrs scilitains - Passion de Perpétue et Félicité. La littérature apologétique grecque : entre défense des communautés et polémique religieuse : Apologie à Hadrien - Apologie pour les chrétiens - Dialogue avec le juif Tryphon - Sur la résurrection - Aux Grecs - Supplique au sujet des chrétiens - Sur la résurrection des morts - Livres à Autolykos - Épître de Barnabé - À Diognète - Fragments divers. Les débuts de la littérature apologétique latine : Apologétique - Octavius. Débats et controverses théologiques : Lettre à Flora - Fragments conservés chez Clément d'Alexandrie - Hypomnèmata - Contre les hérésies. Dénonciation et réfutation de la gnose au nom menteur, livre III - Démonstration de la prédication apostolique. Les débuts de la poésie chrétienne : Épitaphe d'Abercius - Épitaphe de Pectorius d'Autun - Cantique de l'esprit d'enfance - Du bois de vie et de mort - Le Jugement dernier - Invocation à la Pâque et prière au Christ-roi - Hymne lucernaire.
Trad. du grec ancien par un collectif de traducteurs. Édition publiée sous la direction de Bernard Pouderon, Jean-Marie Salamito et Vincent Zarini avec la collaboration de Gabriella Aragione, Guillaume Bady, Philippe Bobichon, Cécile Bost, Florence Bouet, Marie-Odile Boulnois, Catherine Broc-Schmezer, Marie-Ange Calvet Sebasti, Matthieu Cassin, François Cassingena-Trévedy, Frédéric Chapot, Rose Varteni Chetanian, Laeticia Ciccolini, Hélène Grellier Deneux, Steve Johnston, Marlène Kanaan, Sébastien Morlet, Thierry Murcia, Pierre Pascal, Marie-Joseph Pierre, Jean Reynard et Joëlle Soler
Textes traduits du grec ancien, du latin, de l'arabe, de l'arménien, de l'hébreu, du slavon et du syriaque. Index de Jérémy Delmulle
Actes des martyrs scilitains
18 octobre 2016
Cet interrogatoire d'un groupe de chrétiens par le proconsul Publius Vigellius Saturninus, gouverneur de la province romaine d'Afrique, eut lieu le 17 juillet 180. Le texte qui le rapporte est le plus ancien écrit chrétien de langue latine à être parvenu jusqu'à nous.
Sous le consulat de Praesens
« Vous pouvez obtenir l'indulgence de notre seigneur l'empereur, si vous revenez au bon sens. »
Spératus dit : « Nous n'avons jamais fait de mal ni participé à aucune iniquité. Nous n'avons jamais rien dit de mal ; mais, quand on nous maltraitait, nous avons rendu grâces, parce que nous respectons notre Empereur. »
Le proconsul Saturninus dit : « Nous aussi, nous sommes religieux, et notre religion est simple : nous jurons par le génie de notre seigneur l'empereur et nous offrons des sacrifices pour son salut. Vous devez le faire vous aussi. »
Spératus dit : « Si tu veux bien écouter tranquillement, je te dirai le mystère de la simplicité. »
Saturninus dit : « Si tu commences à parler mal de nos rites sacrés, je ne t'écouterai pas. Mais jure plutôt par le génie de notre seigneur l'empereur ! »
Spératus dit : « Moi, je ne connais pas l'empire de ce monde, mais je sers plutôt ce Dieu qu'aucun homme n'a vu ni ne peut voir de ses yeux. Je n'ai pas commis de vol ; si j'achète quelque chose, je paie la taxe, car je connais mon Seigneur, le Roi des rois et l'Empereur de toutes les nations. »
Le proconsul Saturninus dit à tous les autres : « Abandonnez cette croyance. »
Spératus dit : « La croyance mauvaise, c'est de commettre l'homicide, de prononcer un faux témoignage. »
Le proconsul Saturninus dit : « Ne vous associez pas à la folie de celui-ci ! »
Cittinus dit : « Nous ne craignons personne, sinon le Seigneur notre Dieu qui est dans les cieux. »
Donata dit : « Honneur à César en tant que César, mais crainte envers Dieu. »
Vestia dit : « Je suis chrétienne. »
Sécunda dit : « Ce que je suis, je veux l'être. »
Le proconsul Saturninus dit à Spératus : « Tu persévères à te dire chrétien ? »
Spératus dit : « Je suis chrétien », et tous se déclarèrent d'accord avec lui.
Le proconsul Saturninus dit : « Voulez-vous un délai pour réfléchir ? »
Spératus dit : « Dans une affaire aussi claire, il n'y a pas à changer d'avis. »
Le proconsul Saturninus dit : « Qu'y a-t-il dans votre coffret ? »
Spératus dit : « Des livres : des épîtres de Paul, un homme juste. »
Le proconsul Saturninus dit : « Prenez un délai de trente jours pour vous raviser. »
Spératus dit de nouveau : « Je suis chrétien », et tous se déclarèrent d'accord avec lui.
Le proconsul Saturninus lut la sentence sur une tablette : « Spératus, Nartzalus, Cittinus, Donata, Vestia, Sécunda et tous les autres qui ont reconnu vivre selon le rite chrétien, puisqu'ils ont refusé obstinément, alors que la possibilité leur en était offerte, de revenir à la coutume des Romains, il a été décidé qu'ils seraient exécutés par l'épée. »
Traduit du latin par
Jean-Marie Salamito.